On lui connaissait déjà tous les rôles, liane rohmérienne capable de se lancer dans des airs baroques ou de calypso quand elle ne s’improvisait pas meneuse de revue au Crazy Horse. Au printemps, Arielle Dombasle rendait hommage à son panthéon féminin le temps d’un album rendant hommage tout autant à Marlène Dietrich qu’à Joséphine Baker ou Shirley Bassey : Iconics (Universal).
Mais, née aux États-Unis de Français l’ayant élevée au Mexique, l’éternelle petite-fille d’un fervent gaulliste ayant fédéré les Forces libres sur le sol américain ne pouvait résister à l’idée de se rapprocher du feu sacré : le 14 juillet, à 19h30, la chanteuse entonnera, entourée de danseurs et d’athlètes, son hymne intitulé Olympics lors de l’arrivée de la flamme olympique dans le cœur de Paris – à l’Hôtel de Ville.
Chorégraphiée par l’ex-danseuse du Crazy Horse, Pika Matador, la performance sera retransmise en direct sur France 2. L’avant-veille, intrigués par cette idée née sur les harmonies de la Septième de Beethoven, nous avons sollicité un rendez-vous avec la femme d’esprit plaisamment vêtue comme une créature timburtonnienne. Extraits.
Beethoven, profond et triomphant
Il y a quelques années, alors que je chantais Purcell au Grand Palais, certains membres du Comité olympique, la cellule culturelle, et Anne Hidalgo, sont venus m’écouter. L’art et le sport n’ont pas toujours fait bon ménage. Mais, dans la Septième Symphonie de Beethoven, j’entendais une musique profonde et triomphante. Après avoir réuni mes musiciens, nous en avons fait un hymne – Olympics – avec ces paroles faisant l’éloge de la Ville Lumière avec un clin d’œil lancé au chef-d’œuvre d’Hemingway, Paris est une fête : « À Paris, le jour et la nuit/Que Paris soit une fête/Avec tous les athlètes/Tour Eiffel comme un trésor/D’une pluie de médailles d’or. »
La musique classique, c’est de là que je viens, formée au Conservatoire par Rameau, Monteverdi, Gluck, Mozart, Haendel, Purcell… C’est comme ça que j’imagine une ode au monde du sport dans la passion, le dépassement de soi et la solennité. Les airs classiques, les ouvertures d’opéras, beaucoup ne les connaissent qu’au travers des films ou des publicités. Même si j’ai été popularisée par des airs rumbas, calypso, boléros ou merengue, c’est l’étude de la musique classique qui m’a construite. On est tous constitués d’un carrefour de forces et, pour reprendre la phrase du Président Mao, il faut compter sur ses propres forces.
My lady heroïne
Cet hymne est né pendant la gestation de mon album Iconics, qui rend hommage aux femmes qui m’ont formée. Ces femmes qui vous permettent de devenir ce que vous êtes. Je me suis alors penchée sur leur place dans les Jeux olympiques. Elle a été gagnée de haute lutte quand on se rappelle le mépris que leur vouait Monsieur de Coubertin. Selon le fondateur des JO modernes, elles étaient absolument interdites. À ses yeux, elles étaient susceptibles de les abîmer.
Hélène de Pourtalès (1868-1945), cette skippeuse américano-suisse médaillée d’or aux Jeux olympiques de 1900, fut la première à le contredire, même si, à part le croquet, l’équitation, le tennis et la voile, toutes les autres disciplines restaient inaccessibles aux femmes, de la natation aux anneaux. Il fallut gagner des batailles, traverser les frontières du genre. Quant à moi, je conservais le souvenir ébloui d’Esther Williams (1921-2013), cette nageuse et championne olympique, bientôt accaparée par Hollywood. Le cinéma a fait de cette plongeuse une immortelle déesse des océans.
À l’eau, Arielle !
Quand je nage, car je nage, je me sens en apesanteur, oui, j’en profite pour répéter mes textes au cinéma ou les scores de musique. Cet amour de l’eau me vient de mon père. J’ai été élevée au Mexique par un homme très exigeant. Il ne voulait pas d’une petite fille blonde qui a peur.
Depuis, d’ailleurs, je n’ai peur de rien : à l’âge de 7 ans, j’ai pu descendre des torrents ; à l’âge de 8 ans, faire du ski nautique ; à l’âge de 10 ans, faire de la plongée sous-marine. Pour aider mon corps trop léger à descendre dans les profondeurs, on me mettait une ceinture de plomb autour de la taille. C’était dans les eaux du Pacifique. Bien sûr que j’avais peur sur le moment.
Mais j’ai obéi aux désirs de mon père : il voulait une fille intrépide. Sur les tournages, j’effectue moi-même mes cascades, comme sur le dernier film du genre avec Jean-Paul Belmondo, Amazone (Philippe de Broca, 2000). Nager vous aide à respirer. Et quand je chante, c’est le Mexique qui ressurgit. Le souffle, la respiration, c’est une manière de scander les choses, de les articuler, de les timbrer. La voix est un instrument qu’il faut parfaire, domestiquer. Ça fait la respiration et le soutien. On chante avec l’âme, le cœur, mais oui, aussi avec les reins !
De l’eau dans le noir
L’après-concert, c’est un des moments les plus euphorisants de la vie. Une puissance s’est emparée de vous et vous a fait transmettre une émotion que vous gardiez en vous. Je me souviens d’un concert à l’Opéra de Lyon, où j’avais chanté La Paloma, cette « cancion » chantée par les révolutionnaires mexicains raconte l’âme errante d’un homme revenant sur les « lieux du crime », les lieux où il a été tué par son grand amour. C’est très émotif le retour de cette âme depuis le pays des morts. Quand je le chantais, je remarquais que des petites choses brillaient dans le public ; c’étaient des larmes. Ce soir-là, j’ai senti au plus près de ma peau le sens du mot communion.
Femme flamme
La flamme pour laquelle je vais chanter au cœur de Paris en ce 14 juillet a été touchée et chérie par 11 000 personnes depuis son départ de la Grèce. On le chérit, ce feu. Il arrivera à l’Hôtel de ville, où je serai entourée des athlètes et danseurs qui m’ont accompagnée lors du tournage de la vidéo d’Olympics au musée des Arts décoratifs, profitant du cadre de l’exposition « Fashion and sports », d’un podium à l’autre. Nous sommes des êtres prométhéens ; les armes, ce sont les outils qui nous donnent de l’habilité à bâtir des mondes ; le feu, c’est ce qui nous a permis d’être au sommet, en quelque sorte, de toutes les espèces.
Certes, l’homme ne court pas aussi vite qu’un puma mais, si l’on additionne toutes les disciplines auxquelles il s’affronte, cette polyvalence dont il est pourvu, il est une espèce aussi unique qu’extraordinaire. Il faut compter sur ses propres forces qui sont multiples, me dis-je alors en me rappelant cette devise d’Andy Warhol : « Just do it. » Je le crois, comme je ne crois pas aux barrières. Je suis no limit !
Irrésistible comme toujours dans son nouvel EP “ICONICS”, la Marlene Dietrich du 8ème arrondissement Arielle Dombasle nous a confié ses secrets de jeunesse éternelle (les noix de cajou et l’amour). Interview barbiconic.
Une interview à retrouver dans le nouveau numéro de Technikart, actuellement en kiosque.
De Joséphine Baker à Shirley Bassey, son nouvel album ICONICS revisite les standards des icônes d’hier. Un hommage dont elle nous livre les secrets, avec une profonde légèreté.
Arielle Dombasle était l’invitée d’Elodie Suigo sur France Info pour la sortie de son nouvel album ICONICS.
Arielle Dombasle est une artiste à part, atypique. C’est par le biais des films d’Éric Rohmer, des séries télévisées comme Miami Vice ou encore des films devenus culte Un Indien dans la ville (1994), Astérix et Obélix contre César (1999) que le public l’a découvert. Et puis la musique est entrée dans sa carrière avec en premier lieu l’album Liberta en 2000. Aujourd’hui, elle sort un nouvel opus Iconics en forme d’hommage à des personnalités des figures féminines emblématiques telles que Judy Garland, Marlène Dietrich, Shirley Bassey ou encore Joséphine Baker.
franceinfo : Iconics ce sont huit titres à la fois sensuels, féminins, doux, déterminés. Un peu comme vous.
Arielle Dombasle : J’espère que mon album me ressemble. C’est en effet un hommage au féminin, à ces figures qui m’ont éblouie. C’est un peu une éthique de l’admiration. Quand j’étais enfant, j’ai aimé immensément ma poupée Barbie. Après, j’ai souffert qu’on me réduise à la poupée Barbie. Mais après tout, dans cet album, je lui rends hommage parce que c’était une poupée très futuriste, très d’avant-garde et la première poupée féministe parce que ça donnait envie aux petites filles d’être toute sorte de choses. On achetait la poupée Barbie avocate, maîtresse de maison, patineuse, astronaute, médecin et on se disait : “Voilà ce qui m’attend dans le futur” et on choisissait de jouer avec quelque chose qui déjà vous exaltait.
Que représente cet album pour vous ?
Un hommage aux femmes qui auraient pu être des mères, en tout cas qui, moi, m’ont élevée. Et j’aime reprendre, par exemple, Diamonds Are Forever de Shirley Bassey, cette femme qui a incarné par exemple les nouvelles figures féminines de James Bond, qui sont des femmes fortes, qui sont des femmes espionnes, des combattantes.
Au départ, il y a effectivement la danse. C’est l’un des points d’ancrage qui va vous mener à la scène, au théâtre, à l’expression scénique. Vous avez un côté indomptable. Votre grand-père était consul de France à Calcutta. Ensuite, il a été l’un des premiers à rejoindre le général de Gaulle quand il était en exil à Londres. Il a créé la France Libre. Avez-vous gardé cela de lui ?
J’ai été un peu intimidée par le milieu dans lequel je suis née, parce que c’étaient les ambassades, que des gens très brillants, que des gens remarquables. Et on appelait mon grand-père, Son Excellence. C’était en effet quelqu’un de remarquable qui a sauvé un nombre considérable de gens pendant la guerre, qui a reçu tous les artistes exilés en Amérique et qui a donc été un héros. Et sa femme Man’ha Garreau-Dombasle, est la personne qui a le plus compté dans mon existence. Une femme de lettres et femme, avec ce magnétisme qui faisait qu’elle était entourée d’artistes.
À quoi rêviez-vous enfant ?
J’ai commencé par être un bébé, et puis tout de suite, j’ai dansé, j’ai chanté. Je savais enfant. J’ai toujours imaginé que je serais sur scène et sous les projecteurs. J’ai été choisie par Éric Rohmer pour Perceval le Gallois. J’ai commencé comme ça, avec les airs médiévaux.
Parlons de ces femmes que vous reprenez. Elles ont fait partie de l’émancipation des femmes qui ont parfois mis leur vie en danger. Qu’est-ce qui vous plaît dans le fait d’être une femme ?
Ce qui me plaît, c’est qu’elles ont déjà une position un peu plus enviable que pendant 21 siècles de domination masculine. Être une femme au XXIᵉ siècle, c’est une bonne chose. On est encore loin de vivre sur un plan d’égalités. Mais il y a beaucoup de plans sur lesquels, heureusement, nos mères et nos grands-mères ont obtenu beaucoup de choses, et notamment Simone de Beauvoir.
ICONICS, le nouvel album d’Arielle Dombasle est désormais disponible sur toutes les plateformes d’écoute et de téléchargement !
ICONICS, c’est-à-dire des icônes musicales, des stars, des divas… des figures féminines, mi-femmes, mi-légendes, qui ont peuplé mon imaginaire depuis l’enfance.
Elles furent mes premiers modèles, au carrefour de la voix et du style. Elles m’ont accompagnées depuis l’enfance aux quatre coins du monde. Éternelles inspiratrices.
J’ai voulu restituer ces figures dans les morceaux qui, à mes yeux, sont les plus emblématiques des années 50, 60, cet âge d’or d’une époque où le Paradis ne pouvait s’imaginer que flirtant avec les studios de cinéma… au carrefour de la voix, de la légende, du style… américaines, françaises… Barbie, Bardot, Beauvoir.
Arielle Dombasle
Au-delà des vies rêvées, de la multitude des figures empruntées au long d’une carrière qui ne semble guidée que par le désir et par la joie (de n’en faire qu’à sa tête ?), Arielle Dombasle est toujours revenue à celle qui fut sa première inspiration. Parmi les muses qui peuplèrent son imaginaire d’enfant, une seule fut toute à la fois son amie, sa confidente et sa complice. Il s’agit d’une poupée à nulle autre pareille, l’une de ces fées de plastique qui ravissent le cœur des petites filles : Barbie la bien nommée. « C’est la plus féminine et la plus féministe. » déclare Arielle Dombasle toujours émerveillée « elle fut la pionnière dans tous les métiers du monde : infirmière, conductrice de poids lourds, avocate, médecin, top model, business woman, danseuse étoile, femme au foyer et même astronaute avant les premières femmes dans l’espace. »
Quelques décennies après leur première rencontre, Arielle a remplacé Barbie : l’artiste est en effet devenue sa propre créature. Une poupée de chair et de sang qui chante, qui danse et qui réfléchit. Une poupée qui a construit une maison à sa démesure : celle d’une chanteuse qui s’est donnée tous les droits, celle d’une actrice qui a décidé, à l’instar de son modèle, d’endosser tous les rôles.
Marlène Dietrich, Shirley Bassey, Judy Garland, Joséphine Baker… chacune de ces icônes sidérales a été visitée en sa demeure : le ciel étoilé. Arielle s’attaque à leurs standards (Boys in the Backroom, Diamonds are Forever, Somewhere Over the Rainbow, J’ai deux amours…) avec une candeur et une effronterie qui ravit.
Pour la sortie de son nouvel album “Iconics”, Arielle Dombasle était l’invitée de Laurence Boccolini dans “Les Enfants de la Télé”.
Retour sur les moments cultes des invités Arielle Dombasle, Tanguy Pastureau, Jérôme Anthony, Henri Sagnier, Éric Antoine et Agathe Lecaron, moments télévisuels d’anthologie.